Junior Aho : « Je suis satisfait de ma saison »
Pilier de la défense des Mustang de SMU à Dallas, Junior Aho poursuit sa belle aventure outre-atlantique avec comme rêve d’accéder à la NFL. Nous avons pu échanger avec lui sur son parcours, sa saison au sein de SMU et le Super Bowl.
The Free Agent : Junior, peux-tu te présenter en quelques mots au public français ?
Junior Aho : Je m’appelle Junior Aho, j’ai 21 ans et originaire de Nice. Je joue pour les Mustangs de SMU à Dallas depuis cette saison. Je suis aussi joueur de l’équipe de France. J’ai été champion d’Europe avec l’équipe de France en 2018. Je joue au poste de Defensive Tackle.
T.F.A : Peux-tu décrire ton parcours depuis Nice jusqu’à Dallas ?
J.A: J’ai débuté le football américain à 15 ans grâce à des amis de ma famille qui baignaient dedans. Après un premier essai, je me suis dit qu’il fallait poursuivre. Et comme pour chaque sport que j’ai pratiqué mon seul objectif était d’être le meilleur. J’ai rapidement été surclassé et même double surclassé. J’ai été admis en équipe de la région PACA, puis je suis arrivé en équipe de France. J’ai eu la chance de rencontrer les bonnes personnes qui m’ont permis de progresser et de ne pas avoir de limite.
Quand je suis arrivé aux États-Unis, je suis passé par l’école Militaire de New-Mexico qui évolue en JUCO (Junior College). Je ne parlais pas du tout anglais mais je m’en suis très bien sorti en obtenant d’excellentes notes durant l’année et demie de mon passage. J’ai obtenu pas mal de temps de jeu ce qui a pu m’ouvrir de nombreuses portes.
Suite à ça, j’ai reçu 14 offres de différentes universités dont certaines très prestigieuses comme LSU, Oregon ou Auburn. J’ai même été faire leur camp d’entraînement. C’était incroyable. Mais finalement, j’ai « commit » pour Nebraska dans un premier temps avant de me raviser pour m’engager avec SMU.
T.F.A : Pourquoi avoir choisi SMU finalement ?
J.A: Comme je l’ai dit avant, j’avais d’abord donné mon accord pour aller à Nebraska. Mais suite à ce renoncement, les choses ont changé. J’ai reçu à nouveau beaucoup d’offres. Mais SMU s’est montré très direct avec moi et ont vraiment tout misé sur la visite et m’ont fait me sentir à l’aise. Les autres étaient beaucoup trop business et ne parlaient pas beaucoup de mon rôle au sein de l’équipe.
La culture de cette université est vraiment incroyable. Ils essayent de devenir de plus en plus professionnel pour prouver au comité qu’ils sont une équipe dangereuse.
Durant la saison, ils ne nous laissent que peu de temps en dehors du football. Nous avons toujours une séance vidéo ou de récupération à la salle. Ils nous occupent vraiment beaucoup et c’est sans doute l’un des facteurs qui fait que nous avons pu jouer dix matchs cette saison sans aucun cas positif au sein des joueurs.
T.F.A : Au travers de la série Last Chance U sur Netflix, on a pu avoir un aperçu sur l’univers JUCO. Ton passage à ce niveau a-t-il un impact sur le regard de tes coéquipiers et des coach ?
J.A : Absolument pas. Lorsqu’une équipe de Division I choisit un joueur de JUCO, ils ont plus d’attentes. Ils veulent que tu sois prêt rapidement à avoir un impact sur le jeu et à faire gagner ton équipe. C’est la différence avec un joueur qui vient directement de High School. Lorsque qu’un joueur vient du parcours « normal », ils savent qu’ils peuvent prendre le temps de le developper et qu’il a un bagage classique.
Les joueurs font quelques blagues sur le fait que je sois passé par le JUCO en disant que ce n’est pas si dur que ça. Mais c’est tout.
T.F.A : Raconte nous ton acclimatation à SMU
J.A : C’était très compliqué à cause du Covid notamment. Je me suis blessé aux pecs (une déchirure) et je n’ai pas pu me faire opérer. Ensuite j’ai passé une première quarantaine au Mexique puis une nouvelle quarantaine en arrivant à Dallas. Ça ne m’a laissé qu’une seule semaine avant le début du camp d’entraînement pour me préparer physiquement, d’autant plus que j’étais loin de ma meilleure condition physique.
Et puis, il y a tout l’aspect technique et tactique à assimiler. Là aussi, un mois c’est super court pour tout apprendre. Mais la motivation était là et les résultats sont venus aussi très vite.
T.F.A : Quel regard portes-tu sur ta saison ?
J.A : C’est un bon début. Je suis satisfait de ma saison. J’ai réussi à me faire une place forte au sein de l’équipe. Le tournant a été le match face à Memphis. Durant ce match, je réalise un sack qui entraine un fumble que nous avons recouvert. À partir de ce moment là, j’ai commencé à jouer à la fois en défense mais aussi dans les équipes spéciales. Je suis le n°2 dans la défense et je prends même plus de reps à l’entraînement que le numéro 1 !
Il reste encore du travail et du chemin à parcourir et je ne suis jamais rassasié.
T.F.A : As-tu une franchise en particulier pour laquelle tu aimerais jouer ?
J.A : Non, franchement je n’ai pas de préférence. Ce serait déjà un rêve de pouvoir atteindre ce niveau ! Tu sais des fois je suis obligé de me pincer pour me dire que tout ça est réel. Je fais un truc que je regardais à la TV et que je pensais inaccessible. C’est fou !
T.F.A : Le rêve de tout joueurs de foot US et de NFL c’est le Super Bowl. Peux-tu nous donner ton meilleur souvenir ?
J.A : (Réfléchit). Il y en a quelques uns mais je dirai le Super Bowl LV entre les Broncos et les Panthers. Et en tant que défenseur, je retiens le titre de MVP de Von Miller . Avec 2.5 sacks durant le match, ce mec était une vraie bête sur le terrain. Après, il y a aussi le Super Bowl 49 avec l’interception de Wilson sur les 1 yards. Je comprend toujours pas pourquoi il [Russell Wilson] ne fait pas courir Beast Mode [Marshawn Lynch]…
T.F.A : T’inquiète pas, nous non plus… Bref. Le Foot US continue de se developper en France. Que manque-t-il à ton avis pour réellement devenir majeur ?
J.A : Le chemin est encore long en effet mais on voit de l’amélioration. Je pense qu’au niveau de la communication les choses doivent évoluer. Personne ne sait que nous sommes Champions d’Europe. Quand j’en parle, les gens me disent « Ah oui ? Mais en fait on est pas mauvais ! ». Il faut faire parler plus de notre sport pour attirer de plus en plus de personne. Le fait qu’aucun français ne joue en NFL est aussi un désavantage. Toujours à propos de l’équipe de France, cela fait plus de 2 ans qu’il n’y a pas eu de compétition. Il y a eu le championnat d’Europe et puis plus rien. Il n’y a pas de récurrence ni de continuité.
Ensuite je dirais les club et les coachs doivent aussi changer leur mentalités. Les clubs ont aujourd’hui du mal à orienter les joueurs vers la NFL. C’est un plafond de verre qu’il faut casser et cela passe aussi par un coaching à un niveau plus haut. C’est une vraie différence entre ici et la France.
T.F.A : Dernière question avant de te laisser retourner à la muscu (rires). Quel serait ton conseil aux jeunes qui débutent le foot US ?
J.A : (Rires). Il faut qu’ils croient en leurs rêves et de ne jamais écouter les limites que les autres personnes leur donnent. il faut bien s’entourer comme j’ai pu le faire avec mon mentor Massimo Pignataro à Nice. Ne pas sauter les étapes et prendre son temps sont deux choses essentielles dans le sports pour ne pas se brûler les ailes.
T.F.A : Merci Junior ! Ce fût un plaisir et bon courage pour la suite de ta saison et de ta carrière !
J.A : Merci à vous, à bientôt !
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